3. Avantages d’agents biopharmaceutiques
Malheureusement, ces différentes étapes ne se passent pas toujours sans problème. En matière de bioproduction, les chercheurs luttent constamment contre les impuretés présentes dans les fermenteurs – par exemple les rétrovirus qui sont introduits dans les fermenteurs en même temps que la lignée cellulaire. Il est difficile d’éliminer les virus, car ils sont très petits et ne peuvent pas être écartés par filtration. Les bactéries et les champignons peuvent également susciter des problèmes dans les fermenteurs. Ces cas sont certes très rares, mais ils ont de graves conséquences, car il faut alors éliminer tout le contenu du fermenteur.
Pour produire des agents biopharmaceutiques, les chercheurs travaillent avec des lignées cellulaires standardisées toujours identiques, qui sont disponibles dans le monde entier. Celles-ci présentent l’avantage d’avoir été bien étudiées. Les lignées cellulaires de E.coli sont même les êtres vivants les mieux étudiés dans le domaine des sciences naturelles. Si les chercheurs buttent sur des difficultés lors de la production, ils peuvent recourir à un gigantesque arsenal de documentation.
Si les chercheurs ont modifié une lignée cellulaire de manière à produire la protéine souhaitée en quantité satisfaisante, ces cellules sont jalousement protégées comme secret industriel, car elles sont l’aboutissement d’un travail considérable. On peut les conserver sur une longue période à moins 196 degrés Celsius dans de l’azote liquide. La plupart du temps, les entreprises constituent une banque de collection à laquelle elles peuvent recourir en cas de besoin.
Par ailleurs, pour produire des agents biopharmaceutiques, les scientifiques peuvent faire appel non seulement à des micro-organismes et à des cellules de mammifères, mais également à des plantes. Au cours de ces 20 dernières années, le potentiel de différentes plantes pour produire des protéines biopharmaceutiques a été spectaculairement démontré: plus de 20 variétés de plantes différentes ont permis de produire plus de 100 protéines différentes de complexité variable. Aucun produit biopharmaceutique fabriqué à partir de plantes n’a toutefois encore été commercialisé.
Une chèvre génétiquement modifiée produit un principe actif
A l’été 2006 a été pour la première fois homologué en Europe un principe actif qui est produit par une chèvre. Il s’agit en l’occurrence d’une antithrombine humaine, administrée aux patients qui souffrent d’un déficit héréditaire en antithrombine. Ce principe actif prévient la formation de caillots sanguins.
La production d’agents biopharmaceutiques est complexe, coûteuse et comporte également des risques. A cela vient s’ajouter que – du fait de la sensibilité de leur structure – ces principes actifs ne peuvent être administrés aux patients qu’à l’aide d’une seringue. Ils ne peuvent être pris sous la forme plus maniable de comprimés.
La production d’agents biopharmaceutiques se justifie néanmoins parce que ces médicaments présentent certains avantages par rapport aux médicaments classiques: leur action est par exemple très spécifique dans l’organisme, en ce sens qu’ils réagissent exclusivement avec la molécule cible. Leur mécanisme d’action est plus proche de la situation naturelle, ce qui réduit le risque de survenue d’effets indésirables.
Ces avantages des produits biopharmaceutiques sont également synonymes d’un avantage économique. Au cours de ces dernières années, les coûts de recherche et de développement d’un nouveau médicament n’ont cessé d’augmenter et se situent désormais à près d’un milliard de francs. La plupart des principes actifs qui sont testés ne franchissent pas le cap de la commercialisation. Sur 10’000 substances en moyenne testées en laboratoire, une seule parvient jusqu’à la pharmacie ou l’hôpital. A cet égard, les produits biopharmaceutiques s’en tirent mieux : 25 pour cent des agents biopharmaceutiques qui passent avec succès les phases cliniques I à III obtiennent leur autorisation de mise sur le marché. Chez les médicaments classiques, la proportion est de six pour cent.
Ces dernières années, de plus en plus de produits biopharmaceutiques sont arrivés sur le marché. Ils représentent aujourd’hui quelque cinq pour cent du marché pharmaceutique mondial. Selon des estimations optimistes, ce chiffre pourrait passer à 15 pour cent en 2050.
Médicaments produits par génie génétique
Outre l’insuline, de nombreux autres médicaments sont aujourd’hui produits par génie génétique. Par exemple, l’hGH, une hormone de croissance. Cette hormone vient en aide aux enfants qui souffrent d’une forme de nanisme (hypopituitarisme), due à un apport insuffisant de cette hormone.
Autre produit: le TPA, ou activateur tissulaire du plasminogène. Cette protéine aide à dissoudre les caillots sanguins et réduit le risque ultérieur d’infarctus du myocarde lorsqu’il est administré peu de temps après le premier infarctus.
Autre exemple: une petite protéine imite une protéine réceptrice à laquelle se lie le virus du sida quand il contamine des globules blancs du sang. Au lieu de cela, le virus se lie aux molécules du principe actif et se trouve donc empêché d’infecter les cellules sanguines (inhibiteur de fusion). De même, chez une partie des femmes ne parvenant pas à réaliser leur désir d’enfant, la biotechnologie peut apporter son aide: la FSH (hormone folliculostimulante) est aujourd’hui fabriquée par génie génétique.
Parmi d’autres produits, on citera: l’interféron alpha (actif contre la leucémie à tricholeucocytes, l’hépatite B et le cancer du rein), l’interféron bêta (infections virales et sclérose en plaques), l’interféron gamma (hypernéphrome – une forme de cancer du rein – et polyarthrite rhumatoïde), l’interleukine 2 (sida, cancer, polyarthrite rhumatoïde), le facteur de nécrose tumorale (cancer, infections virales), l’EPO (anémie, dopage), le facteur VIII (hémophilie), la protéine G (maladies auto-immunes). Certains vaccins sont aujourd’hui également produits par génie génétique (par exemple contre l’hépatite B) ainsi que tous les médicaments fondés sur des anticorps, comme l’Herceptin (voir chapitre Anticorps monoclonaux).